« Seul(e)s ceux recommandé(e)s peuvent prêcher ! » Une dérive extrémiste infondée

L’imam ۶Abd Ar-Rahmân ibn Yazîd ibn Jâbir رحمه الله  a dit : « Ne prenez la science que de ceux dont on a attesté qu’ils ont étudié » (1)

Le manque de connaissance et de compréhension ont malheureusement laissé naître chez certain(e)s des ambiguïtés blâmables et les ont fait tomber dans des dérives [extrémistes ou laxistes] aux antipodes du chemin droit et clair de l’Islam sur lequel nous a laissé notre bien aimé Prophète (). Et il est d’autant plus triste de voir des personnes qui s’affilient au manhâj salafî béni nuire à celui-ci et sa prédication à cause de cela.

En effet, affectées par les mêmes ambiguïtés et dérives extrémistes que les haddâdî sectaires, beaucoup dénigrent, discréditent, et critiquent les efforts de frères et de sœurs participants à la prédication sur le seul argument qu’ils ne possèdent pas de tazkiyah – recommandation -. Cela sans même avoir étudié minutieusement cette question, et compris convenablement les textes, les règles, ainsi que les paroles de savants [anciens et contemporains] qu’ils sélectionnent et avancent comme argument. Et sans même avoir saisi que les prétentions à la prédication sont de plusieurs genres, et que chacune d’elle nécessite un niveau de compétence et de qualification différent.

Alors que tout individu doté d’esprit et d’équité reconnaît sans conteste que les qualifications à réunir pour faire la khutbah – sermon – du Vendredi ne sont pas les mêmes que celles requises pour l’enseignement et l’explication des sciences religieuses. De même que les compétences exigées pour la retranscription des paroles des gens de science ne sont pas les mêmes que celles demandées pour la traduction, etc.

Sur quelle base peut-on dès lors les mettre toutes au même plan, et réclamer pour toutes les mêmes compétences et le même niveau de qualification ?! Cela n’est pas équitable, et Allah () dit :  Allah vous ordonne de restituer les dépôts à leurs ayants droit et, lorsque vous jugez entre les gens, de juger avec équité … ﴿ (2)

D’ailleurs, si ces personnes analysaient impartialement les textes de la révélation, elles ne porteraient pas préjudice à la prédication en faisant barrage à celle-ci avec des contrevérités. Voyez par exemple ce hadith rapporté par l’imam Al-Bukhârî et Muslim dans lequel Abû Sulaymân Mâlik ibn Al-Huwayrith Al-Laythî (رضي الله عنه) a dit : « Nous étions un groupe de jeunes presque du même âge à rejoindre le Prophète () à Médine. Nous restâmes auprès de lui vingt jours. Il était sensible et plein d’attention. Devinant que nous ressentions de la nostalgie pour les nôtres, le Prophète () nous posa quelques questions à leur sujet. Nous l’en informâmes. « Retournez chez vous » nous dit-il « Restez auprès des vôtres, instruisez-les et transmettez-leur mes enseignements » Il nous dit entre autres : « Accomplissez la prière comme vous m’avez vu faire. À l’heure de la prière. Chargez l’un de vous de faire l’appel à la prière, et le plus âgé de la présider » » (3)

Est-ce que le Prophète () a interdit à ces compagnons de propager l’Islam parce qu’ils n’étaient restés que vingt jours et n’avaient pas encore acquis un niveau de connaissance approfondi de la religion, ou il () leur a plutôt ordonné de transmettre fidèlement ce qu’ils avaient déjà appris de lui () et maîtrisaient ?!!!

Voilà donc ce qui est prioritairement exigé de la part de celles et ceux voulant participer à la prédication, de n’endosser que les responsabilités que leurs compétences les autorisent à prendre, et de s’y tenir rigoureusement et de confier celles qui dépassent leur qualifications à leurs ayants-droit. C’est avec cette précision et cette minutie qu’il faut examiner les types de prétention à la prédication. Et le manque d’intégrité de certains [trop souvent constaté malheureusement] à prendre des responsabilités qui dépassent hautement leur niveau de compétence et de qualification ne permet aucunement de basculer dans l’extrémisme haddâdî sectaire et de faire barrage à la propagation du manhâj salafî béni. Il est alors injuste de confondre les efforts de ceux qui se cantonnent fidèlement à ce que leurs compétences les autorisent à faire, aux entorses de ceux qui manquent indignement de retenue en endossant des responsabilités qui les dépassent hautement.

Malheureusement, pour défendre leurs ambiguïtés et justifier leur dérive sectaire, ces personnes essaient d’avancer certaines paroles de savants [anciens et contemporains] qu’elles ont sélectionnées au détriment de nombreuses autres n’allant pas dans leur sens. Il arrive qu’ils sélectionnent aussi des paroles qu’ils n’ont pas compris convenablement ou qu’ils instrumentalisent malhonnêtement. En effet, voyez par exemple cette réponse de Cheikh Abû Hâzim Muhammed ibn Husnî Al-Qâhirî (حفظه الله), avancée par certains comme un argument prouvant qu’il faut obligatoirement avoir une tazkiyah pour pouvoir prendre des responsabilités dans la prédication, lorsqu’il (حفظه الله) lui a été posé la question suivante : « Il y a un groupe (Whatsapp/Telegram) d’enseignement de certains livres de tawhid et de croyance, comment peut-on être sûr de l’intégrité des administratrices ? (Nous sommes des femmes) ». Il (حفظه الله) répondit : « Pour le groupe mentionné, il est à délaisser jusqu’à ce que vous questionniez les administratrices » (4)

Où est-ce que le Cheikh (حفظه الله) a utilisé le terme tazkiyah ou fait allusion à celle-ci pour utiliser sa réponse comme un argument prouvant qu’il en faut obligatoirement une pour pouvoir prendre des responsabilités dans la prédication ?!

Le Cheikh (حفظه الله) confirme seulement que l’on ne prend pas la science de quelqu’un (d’un groupe, compte, et autre) tant qu’on ne le connait pas. Ce qui est tout à fait normal, car on ne prend pas la science d’un inconnu.

Voilà donc un parfait exemple de manque de compréhension et la démonstration de l’instrumentalisation malhonnête de la réponse d’un Cheikh.

D’ailleurs, voyez comment avec un minimum d’honnêteté scientifique, et d’intégrité religieuse, on trouve aisément une réponse du même Cheikh (حفظه الله) bien plus précise et appropriée à la situation, qui confirme que la tazkiyah n’est pas tout le temps nécessaire pour participer à la prédication. En effet, le 6 novembre 2017 il fût dit au Cheikh (حفظه الله) : « Nous avons ouvert un groupe sur l’application « WhatsApp » afin de propager le manhaj de ahl Sunnah wa al-jamâ۶ah – la méthodologie des adeptes de la Sunnah et du groupe consensuel – en arabe et en français. Il sera publié en arabe les audio et articles de savants et étudiants en science salafî. Et il sera ainsi partagé en français les traductions des paroles des savants de certains prédicateurs francophones, ainsi que leurs prêches [du Vendredi] et cours en français. Cependant, certains d’entre eux ont été recommandés par des savants, et d’autres ne l’ont pas été. Nous vous demandons donc conseille et vous consultons à propos de la propagation en français. Devons-nous continuer comme cela a été décrit (en publiant les traductions et enseignements de ceux qui ont été recommandés et ceux qui ne l’ont pas été), ou devons-nous nous contenter de publier [les travaux] de ceux qui ont été recommandé parmi ces nobles frères francophones ? ». Le Cheikh (حفظه الله) a alors répondu : « La tazkiyah n’est pas requise dans un tel cas. La traduction est pure transmission. Ce n’est pas un enseignement ou quelque chose dans son sens. Au contraire, la condition est que la traduction soit correcte et que le traducteur soit connu pour être intègre auprès de ses frères » (5)

On voit donc que le Cheikh (حفظه الله) affirme clairement que la tazkiyah n’est pas nécessaire pour traduire et transmettre les paroles des gens de science. Il faut seulement pour cela que les efforts [de traductions et autres] dans la prédication soient correctes, sans erreurs, et que les personnes endossant ces responsabilités soient connu(e)s pour être intègres. C’est-à-dire, connu(e)s pour leur bonne croyance et méthodologie, pour suivre le Qur’ân et la Sunnah, et la voie des pieux prédécesseurs, des imams et savants [anciens et contemporains].

Il ne fait donc aucun doute quant à l’importance de la tazkiyah et sa nécessité dans certains cas, le fait qu’on ne prend pas sa religion d’un(e) inconnu(e), et qu’il est impératif de se renseigner sur les compétences et qualifications de l’individu de qui l’on souhaite prendre la science. Seulement, il faut comprendre convenablement quand est-ce que cela est nécessaire et l’appliquer sagement et avec équité. Et de bien distinguer les différents genres de prédication et ne pas les mettre tous au même plan, et réclamer pour chacun d’eux les mêmes compétences et le même niveau de qualification. Savoir quand est-ce que c’est véritablement de l’enseignement et quand est-ce que c’est simplement de la transmission.

Il ne faut donc pas se laisser tromper par tous les arguments mis en avant ! ۶Alî ibn Abî Tâlib (رضي الله عنه) a d’ailleurs bien eu raison lorsque faisant face aux égarés qui lui disaient que Le jugement n’appartient qu’à Allah (), il (رضي الله عنه) a dit : « C’est une parole véridique par laquelle on veut (défendre) le faux » (6)

Il ne faut pas se laisser berner par le manque de compréhension des uns ou les ressentis blâmables et ambiguïtés haddâdî extrémistes des autres qui déforment et instrumentalisent les paroles des gens de science pour rendre la tazkiyah obligatoire pour toute participation à la prédication.

Il est donc infondé et illégitime de critiquer les traductions des étudiant(e)s en science qualifié(e)s  et les efforts corrects et fidèles de prédication de personnes compétentes sous prétexte qu’ils ne sont pas diplômé(e)s d’une université ou recommandé(e)s par un savant.

Il faut donc bien comprendre la différence entre l’analyse Salafi bâtie sur la sagesse, la raison, et l’équité, qui accorde à chaque individu le rang qui lui correspond, et ces dérives haddâdî extrémistes, sectaires et erronées rabaissant, dénigrant et critiquant sans argument valable des efforts louables dans la prédication.

Demandant à Allah () de nous accorder la connaissance, le suivi, et la pratique de la Sunnah authentique de notre Prophète Muhammed (). Et d’améliorer l’état (individuel et collectif) de la communauté musulmane, de nous unir sur la vérité, de nous préserver de l’égarement et de nous garder de la division.

Écrit par :

Abū ۶Abd Ar-Rahmān ۶Ādil ibn ۶AbdiLlah As-SiqilīpastedGraphic.png

1 : Voir « târîkh dimashq » (T : 36 / P : 58), « al-kifâyah fî ۶ilm ar-riwâyah » (T : 1 / P : 288 / n°: 230)

2 : An-Nisâ’ : Les femmes, v : 58

3 : Rapporté dans l’authentique de l’imam Al-Bukhârî (T : 8 / P : 26 / n°: 6013) – édition « Dar At-Ta’sîl », et Muslim (T : 2 / P : 405 / n°: 671) – édition « Dar At-Ta’sîl »

4 : https://t.me/abuhazemFatwa/5213

Version de la chaîne d’où a été prise cette traduction.

5 : https://t.me/abuhazemFatwa/13563

Traduction assurée par nos soins.

6 : Rapporté dans l’authentique de l’imam Muslim (T : 3 / P : 268 / n°: 1077) – édition « Dar At-Ta’sîl »